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.Kélys s’est lancée dans des recherches encore sans résultats dans les plus anciennes Archives de Béthély, pour essayer de trouver… quoi ? Si les Juddites de la Ruche de Béthély ont inventé la deuxième Garde de toutes pièces après que leurs ancêtres eurent effacé toutes traces de la première, elles n’en ont sûrement laissé la confession nulle part !Fausse ? Vraie ? La Garde de Hallera, celle de Halde ? Vraies toutes les deux, fausses toutes les deux ? Je ne sais pas.Je ne sais plus ce que je crois – ou ce que je ne crois pas.La remarque de Mooreï continue à résonner en moi depuis le conseil.« Tu voudrais être obligée de croire.» Et c’est vrai ! C’était possible, plausible, que le procès de Markali ait été arrangé et manipulé avec l’aide de la fille de Hallera pour asseoir la divinité de Garde et de la Parole, et tout ce qui en découlait pour le futur Pays des Mères.Et cela me suffisait auparavant.Maintenant, c’est encore plus possible et plausible puisque Hallera pourrait fort bien être tout simplement une menteuse.Mais cela ne me suffit plus.Au lieu d’être confortée dans la certitude de mon incroyance, je doute.Pourquoi ? Le testament de Halde peut être contesté avec les mêmes arguments que j’ai toujours utilisés contre Hallera, non ?Kélys cherche dans les Archives de la fin des Ruches.Il existe une tradition – dit-elle – voulant que Markali et Alicia aient été amies, ou compagnes, lune ayant choisi la voie du Mal et l’autre celle du Bien ; histoire classique, il y a des dizaines de contes et de romans sur ce motif.C’est Alicia qui a fait organiser le procès dont Markali est sortie vivante – ce qui s’expliquerait bien si elles étaient en collusion secrète.Des Juddites se seraient soudain efforcées de garantir la divinité de celle qu’elles avaient fait massacrer (si on en croit Halde) une centaine d’années plus tôt ? La révolution qui a mis fin aux Ruches est venue de l’intérieur, cela au moins on le sait.Une partie des Juddites converties par Garde à la fin des Harems auraient conservé son souvenir malgré toutes les persécutions et l’auraient réactivé en n’hésitant pas à monter une supercherie, la fin justifiant pour elles les moyens : il s’agissait d’accélérer le processus de transformation, sans trop de violences.Et somme toute elles y sont parvenues : le Pays des Mères a fini par se constituer, nous sommes là, et assez pacifiques tout de même.La première Garde, alors, celle de Halde, serait « la vraie ».La vraie Fille d’Elli.Qui ne voulait pas être appelée ainsi.Mais vraiment divine et humaine, morte et ressuscitée.Mais s’il y a eu supercherie la deuxième fois, pourquoi pas la première ? C’est aussi ce qui troublait Mooreï : qu’une des deux Garde soit fausse contamine inévitablement l’autre, quelle que soit celle qu’on veut considérer comme « la vraie », n’est ce pas ?Et je me retrouve avec son « Tu voudrais être obligée de croire » – ou de ne pas croire.Tout le monde autour de moi croyait que Garde était bien la Fille d’Elli et je voyais plutôt la possibilité de la supercherie.Et maintenant, si j’envisage que les deux soient fausses, mon esprit me présente aussitôt la possibilité que l’une au moins soit vraie ! Il n’y a pas plus de « preuve » pour la première Garde, seulement ce que dit Halde.Alors pourquoi cette absence de preuve formelle dans un cas me pousserait-elle soudain du côté de la croyance, quand l’abondance de preuves formelles, dans le cas de Hallera, me poussait du côté du doute ? Ce n’est quand même pas par pur esprit de contradiction !Je suis complètement perdue.J’ai passé toute la nuit à discuter avec Mooreï, le soir du conseil.Elle avait semblé troublée, elle aussi, pendant la réunion.Mais elle ne l’est plus vraiment.Ou plutôt, oui : elle est troublée de penser aux machinations qu’on doit prêter aux Juddites de Béthély autour de toute cette affaire, à la fin des Harems aussi bien qu’à la fin des Ruches ; elle pense aux conséquences politiques à moyen et à long terme, elle pense aux conséquences sur la foi des autres, elle pense aux conséquences pour Tula (qui apprend de façon plutôt rude ce qu’être la Mère peut vouloir réellement dire), pour Lisbeï, dont le désir de vérité et le respect du savoir sont violemment contrariés.Pour Selva, dans ses futures relations avec ses filles et la Famille.Pour la Famille même, quand elle saura qu’on ne lui a pas appris les faits tout de suite.Mais Mooreï, pour elle-même, n’est plus troublée.Et sais-tu pourquoi ? Parce qu’elle sait intimement qu’Elli est, et que Garde a dit la vérité dans sa Promesse.Elle le sait parce qu’elle a Dansé à la Célébration, parce qu’elle Danse encore.Toujours la même réponse.La tienne, celle de toutes les autres Croyantes que j’ai interrogées.(Et celle de Kélys aussi, même si ce n’est pas une Croyante, tout compte fait.)Et moi je n’ai jamais Dansé, je n’ai jamais voulu Danser.Je n’ai jamais assisté même à la Danse.Tu te rappelles tous mes arguments ? Par respect pour la croyance d’autrui, par dégoût pour cette frénésie que je comprenais trop bien… ou par respect pour moi-même, ou que sais-je encore.Mais le fait est que je n’ai jamais voulu essayer.Ni avec toi ni avec personne.Pour quoi faire, puisque je comprenais si bien ce qui se passait, toute la mécanique… N’est-ce pas ?Mais Mooreï est tellement sûre de ce qu’elle croit.Et moi, tout à coup, tellement incertaine : et si j’étais vraiment passée à côté de quelque chose ? S’il y avait vraiment autre chose que la mécanique et le rituel, dans la Danse ?Et Garde n’en parle même pas, de la Danse, si on en croit le témoignage de Halde !Mais si Garde était vraiment ressuscitée, si Elli existait réellement…Et à en croire Mooreï, je saurais, si je Dansais.Je saurais que c’est vrai.Mais alors, si je voulais être obligée de croire, pourquoi ai-je encore peur ? Je n’aurai qu’à Danser à la Célébration le mois prochain et je serai obligée de croire.Ou peut-être pas.Il y en a qui Dansent et qui ne croient quand même pas.C’est Mooreï elle-même qui me l’a rappelé.Même là, je serais forcée de choisir.Et je ne peux pas, je ne peux pas me décider à choisir, à sauter, à croire.Oui, j’ai peur.Je ne sais pas trop de quoi.De ma liberté ? J’ai ressenti un choc quand Mooreï a parlé de liberté au conseil, mais à vrai dire, je ne sais pas pourquoi ; qu’ai-je donc compris à ce moment-là ? Il devrait y avoir une suite d’illuminations pour m’expliquer ce choc, mais elles ne viennent pas.Si j’ai toujours été prête à croire en une machination des Juddites autour de Garde, c’est parce que j’aurais voulu qu’il n’y ait pas même l’ombre d’un doute, j’aurais voulu être forcée de croire, oui ! Et puis, je n’aime pas les Juddites.Elles crieraient à l’Abomination si je révélais publiquement ce que je sais de la Maladie et de ses effets.Elles me pointeraient du doigt et m’appelleraient moi-même Abomination, et toi, et Lisbeï, et les autres.Enfin, pas toutes les Juddites, mais certaines.Est-ce pour cela que le témoignage de Halde me convient mieux que celui de Hallera ? Parce qu’elle dénonce les Juddites ?Pour cela aussi.Je ne suis qu’humaine, moi.Et Garde… Celle de Halde est tellement humaine.Est-ce pour cela que sa divinité me semble plus plausible, alors, que dans les pieuses certitudes de Hallera ? Je dois avoir l’esprit de contradiction, après tout [ Pobierz całość w formacie PDF ]
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