[ Pobierz całość w formacie PDF ]
.– Ne vous inquiétez pas, me dit-il.Je vous promets que l’on s’occupera du petit Francher.– Oui.(Je fermai les yeux et me serrai contre lui).Le shérif s’ils l’attrapent.On s’apercevra d’un instant à l’autre que les instruments ont été dérobés si ce n’est déjà fait.– Vous lui avez donné à réfléchir.Sinon, il ne serait pas resté sans réagir.– C’est trop tard.Le temps d’une pensée trop tard.Blottie sur mon lit, j’essayai de faire le vide dans mon esprit.Je restai ainsi sans bouger jusqu’au moment où le froid commença à m’engourdir.Alors, je m’emmitouflai jusqu’au menton dans ma chaude robe de chambre de laine et, m’installant devant la fenêtre, je me perdis dans la contemplation de la dentelle fantomatique des peupliers qu’argentait un pâle clair de lune.Combien de temps s’écoulerait-il avant qu’une bonne âme vienne me raconter en se pourléchant les babines le dernier méfait du petit Francher ? Je posai les coudes sur l’appui de la fenêtre et cachai mes yeux derrière mes mains.– Oh ! Francher ! Mon Enfant ! Mon Petit Enfant solitaire et perdu…– Je ne suis pas perdu…Je relevai la tête avec ahurissement.Une voix si douce.J’étais peut-être le jouet de mon imagination…– Non, je suis là.Le petit Francher émergea du halo laiteux de la lune avec une détermination et une assurance sans commune mesure avec sa gaucherie d’adolescent monté en graine.– Oh ! Francher…Je ne pouvais pas me laisser aller à pleurer mais ma voix s’était éraillée quand j’avais prononcé la seconde syllabe de son nom.– Ne vous en faites pas.Je les ai rapportés.Ma tension se relâcha.J’en avais mal aux épaules.– Je n’ai pas eu le temps de les remettre dans la salle, poursuivit-il, mais j’ai tout rangé bien en ordre devant la porte.(Un sourire éclaira son visage).Ils ne comprendront jamais comment ils sont arrivés là !– Je suis désolée pour tes économies, dis-je avec gêne.Il me regarda d’un air grave.– J’en ferai d’autres.Et, un jour, je l’aurai, ma musique.Si ce n’est pas maintenant, ce sera plus tard.Qu’est-ce que cela change ?J’eus soudain l’impression qu’une bulle tiède me comprimait les poumons et un fourmillement d’excitation me parcourut les doigts.Je me penchai à la fenêtre.– Francher, tu l’as, ta musique.Tu l’as dès maintenant.Souviens-toi de l’harmonica.Rappelle-toi quand tu dansais avec Twyla.Oh ! Francher ! Un son c’est une vibration.Tu sais faire vibrer l’air sans avoir besoin d’instruments.Rappelle-toi les accords que tu as créés avec l’orchestre ! Recommence à jouer, Francher !Il me regarda d’un air abasourdi et, d’un seul coup, ce fut comme si une bougie illuminait ses traits.– Mais oui ! s’exclama-t-il.Mais oui !Et, doucement, très doucement – parce que c’est ainsi qu’ont lieu les miracles –, un accord s’éleva dans la nuit.Un accord qui s’enflait, prenait consistance et densité.Doucement.La cour tout entière vibrait, c’était un orchestre au grand complet qui fredonnait son cri sous la lune.– Mais les airs ! s’écria Francher que ce prodige laissait déjà sur sa faim.Je ne connais pas les airs que jouent les orchestres.– Il y a des partitions.De pleins recueils de symphonies, d’opéras, de…– Et quand je connaîtrai mieux les instruments… (C’était la voix frémissante et passionnée du nouveau-petit-Francher).Tout ce que j’entendrai… Deux mesures du dernier rock à la mode retentirent dans la cour qui se muèrent en un Adoramus Te auquel succéda Poète et Paysan).Un jour, je ferai ma propre musique…Le frémissement d’un raïpour s’insinua dans la trame mélodique et mourut.Maintenant, c’était le silence.Le petit Francher me regardait.Pas mon visage.Quelque chose tout au fond de moi.– Mademoiselle Carolle ! (Au son de sa voix, je sentis les larmes me monter aux yeux).Vous m’avez donné ma musique.(Je pus l’entendre avaler sa salive).Moi aussi, je veux vous donner quelque chose.(D’un geste vif, il coupa court à mon geste de protestation).Venez dehors, s’il vous plaît.– Dans cette tenue ? Je suis en robe de chambre et en pantoufles.– Votre robe de chambre est assez chaude.Tenez, je vais vous aider à passer par la fenêtre.Avant même d’avoir réalisé, j’étais à l’extérieur, cramponnée au rebord de la fenêtre, éperdue de vertige.– Mes prothèses ! (Le mot m’était sorti de la gorge dans un cri odieux).Mes béquilles !– Non, dit le petit Francher.Vous n’en avez pas besoin.Allez-y, mademoiselle Carolle.Traversez la cour.Toute seule.– Je ne peux pas ! criai-je, à travers mon affolement.Ne me fais pas enrager, Francher !– Si, vous le pouvez.C’est mon cadeau.Je ne suis pas capable de vous guérir mais, ça, je peux le faire.Marchez !Je m’agrippai au balcon.Et, soudain, j’eus la vision de Francher et de Twyla descendant en spirale du haut des arbres, de Francher faisant le poirier dans les airs, le nombril à découvert, de Francher faisant faire des ricochets d’un pré à l’autre à la Roche qui Branle.Je lâchai mon point d’appui.Fis un pas.Puis un autre.Puis un autre.J’écartai les bras.On ! la merveilleuse liberté ! Je ne serrais plus les poings, je n’avais plus de crampes aux coudes ! Je traversai la cour dans toute sa longueur sous la clarté laiteuse de la lune et chaque pas que je faisais était un hymne, un chant d’action de grâces.Arrivée à la grille, je me retournai.Le petit Francher, accroupi devant la fenêtre, était un bloc de concentration.Je me dressai sur la pointe des pieds et repartis en arrière, moitié glissant ; moitié courant.Le vent de la vitesse qui soulevait mes cheveux dégageait mes joues.S’abreuver quand on a soif ! Manger après la disette ! C’était comme des portes qui s’ouvraient toutes grandes !Je basculai en avant et me rattrapai au rebord de la fenêtre.Et poussai un cri inarticulé quand le boulet familier m’entrava à nouveau les pieds, quand la semi-mort que je connaissais si bien reprit ses droits.Je m’écroulai par terre à côté du petit Francher.Son regard torturé croisa le mien.Il était pâle, hagard.Il leva le bras pour essuyer ses joues ruisselantes de sueur et murmura d’une voix entrecoupée :– Excusez-moi.C’est tout ce que je peux faire pour le moment.À l’instant où je tendais mes bras vers lui, il y eut un mouvement, si rapide et si proche que j’écartai mon pied qui faisait obstacle.Je levai la tête.C’étaient le Dr Curtis et quelqu’un d’autre dont je ne distinguai que la silhouette [ Pobierz całość w formacie PDF ]
  • zanotowane.pl
  • doc.pisz.pl
  • pdf.pisz.pl
  • centka.pev.pl
  •